Test écrit par Murazame
Prévu de sortir initialement sur super famicom, le troisième rejeton de la famille Albert vint finalement grossir les rangs du rpg sur Saturn. Après deux jeux tactiques, le dernier Albert Odyssey en date se dévoila cependant sous la forme d'un rpg classique et sera avec Magic Knight Rayearth l'autre jeu du genre que l'on allait pouvoir envier à nos voisins américains. À défaut de bousculer les normes, il n'offrait pas à la console de SEGA le plus impressionnant de ses joyaux 2D mais indéniablement l'un des plus charmants.
Ce héros qui Pike la place d'Albert
Pike est un humain sur lequel le destin a décidé de s'acharner. Ses parents biologiques sont morts en voulant le protéger contre une armée de trolls qui décimèrent son village, alors qu'il venait de naître. Recueilli et élevé avec amour par Laïa, une jeune harpie, voilà qu'il tombe seize années plus tard nez à nez avec un bataillon de wyverns, en se rendant au puits situé aux abords du bled... la veille de l'anniversaire de sa maman adoptive !
À la tête de cet escadron, un vil sorcier dénommé Belnard, intéressé pour Dieu seul sait quel sinistre dessein par l'énorme cristal magique, un vestige déifié par les habitants du coin qu'il déroba impunément, non sans avoir jeté un sort qui transforma en pierre les malchanceux Pike et Laïa, venue le rejoindre entre temps suite à un mauvais pressentiment. Heureusement, Pike fut aussitôt sauvé par Fatie (Cirrus dans la version américaine du jeu), l'épée magique vivante, héritée de son défunt père et qui l'accompagne depuis la tragédie de son enfance.
Ici donc débute la première des deux aventures qui attendent Pike et ses futurs camarades de route. Affublée d'un “gaiden” (c'est à dire un hors-série), son histoire reste toutefois ancrée dans le monde du brave Albert même si c'est Guy, puissant guerrier au service du Roi et détenteur d'une lame mythique, la Carna Blade, qui incarne l'actuel descendant de la fameuse lignée. Une fois le sort de Radolia Eldean scellé, Pike et les siens devront en effet faire face, dans une deuxième partie, à la dernière progéniture des Oswald, cette famille d'éminents magiciens combattue depuis toujours par la dynastie des Albert. La légende des frères Eldean et leur soeur (celle qui est résumée en images avant l'écran titre) vient “seulement” donc enrichir l'univers de la série.
Amorcée par la disparition en cours de mission de Guy et ses deux accolytes Seramith et Balt (Aine Blood et Varetta), ce second acte s'inscrit dans la continuité scénaristique du précédent et s'avère être d'ailleurs un tantinet plus grave et moins original, puisque la chute des quatre tours freinant l'accès au repère de Nolma Geo Oswald (Novia), protégée chacune par un de ses valets, en constitue une bonne moitié. Exceptée la venue de Carole (Kia), apprentie magicienne têtue et petite fille de Balt qui est sa grand-mère, en remplacement de Leos, il faut dire que le chapitre premier a pour lui le privilège d'introduire tous les autres membres de l'équipe, en développant pour eux un mini feuilleton jamais totalement sérieux.
Oh, Albert ! Oh, dis ! C'est lent !
Il est vrai que les scènes drolatiques ne manqueront pas. Pourtant, portée en cela par la bande son du compositeur attitré de la série, le bien inspiré Kodaka Naoki, l'humeur se veut davantage au sentimentalisme. Les sonorités graves et celtes de la ville de Chestoria ou un peu tribales du village de Tôwara (Tomori), la mélodie plaintive enveloppant le village des harpies, ou bien encore les envolées lyriques au son desquelles vibre la carte du monde. Le tout forme un ensemble élégiaque qui saura vous arracher une larme et ce dès l'introduction, où les premières notes d'une mélopée douce et poignante titilleront vos esgourdes.
Techniquement par contre, le jeu de Sunsoft ne fut pas très ambitieux ni même exempt de petits ratages. La carte sur laquelle on se balade n'est qu'une vieille relique (le mode 7 ?) d'une version super famicom abandonnée, les décors qui servent d'image de fond aux combats présentent de disgracieux effets d'escaliers, et on constate également un recyclage d'éléments visuels paresseux ici et là (donjons, villages ou intérieurs ressemblants d'un lieu à un autre). Loin de faire transpirer la Saturn, Albert Odyssey Gaiden “Legend of Eldean” n'est guère plus impressionnant que les fleurons du genre sur la console de Nintendo suscitée ; les gros sprites et les effets magiques lumineux faisant “pleinnement” usage des transparences mis à part. Rien néanmoins qui ne saurait vraiment gâcher la fête, le graphisme restant indéniablement son second gros atout, celui par lequel il sera difficile pour certains de ne pas succomber à son charme délicieusement désuet.
Conquis (ou non) par les formes séduisantes de ce hors-série, toujours est-il que d'autres déceptions plus conséquentes vont, hélas, déferler assez tôt sur le joueur à un rythme proportionnellement inverse à celui des combats qui est très mou. Ça commence avec un champ de vision restreint lors de nos excursions dans les grandes plaines du continent, un désagrément qui serait anecdotique si, en plus de nous fournir un petit aperçu de la carte globale dans un coin de l'écran comme il est coutume d'avoir, le taux de rencontres hostiles n'était pas aussi élevé et les temps de chargement aussi longs. Quel soulagement donc de pouvoir profiter d'un système de téléportation entre lieux déjà visités via des items au début, puis la magie un peu plus tard, car il faudra patienter jusqu'au dernier quart du jeu environ avant de dégoter le Cornelius, un moyen de transport prenant les traits d'un poisson volant rapide nous mettant à l'abri de toute hostilité. Évidemment, le problème demeure une fois à l'intérieur des donjons, lesquels souffrent des mêmes maux (loadings et fréquence des combats) mais, par chance pour le coup, leur configuration jamais bien retorse sauvera peut-être la vie de quelques manettes... Du moins jusqu'à l'épreuve finale, véritable calvaire de plusieurs étages blindé de téléporteurs ! Et pour en voir le bout, il vous faudra souffrir aussi un système de jeu vieillot et, à l'exception de celle où l'on affronte Ain et ses dangereux atomic flare à répétition dans la tour de l'Est, des batailles lymphatiques.
Albert Odyssey Gaiden “Legend of Eldean”, c'est un peu le stéréotype du jeu médiocre dans un enrobage très aguicheur. Dénué de challenge mais pas d'humour, paré d'une esthétique aussi bien graphique que sonore (absolument) superbe mais d'un gameplay archaïque qu'une optimisation désastreuse rend d'autant plus indigeste, il définit à merveille cette histoire bien connue du verre à moitié plein quelque soit la version du reste car, pour tenter de corriger certains défauts dans la mouture américaine (des temps de chargement raccourcis, la fréquence des batailles diminuée et l'allure des personnages marchant en diagonale accélérée), l'effort fourni par Working Designs est louable mais ne fait au mieux que les atténuer.
Terriblement classique sans être parfaitement linéaire toutefois, grâce à la présence de trois sub-quests facultatives assez difficiles à dénicher mais qui valent le coup d'oeil (nouveaux personnages, lieux cachés et même un combat contre un gros robot !), il est plutôt recommandable à ceux qui, jamais rassasiés, aiment replonger dans l'ambiance irrésistible du rpg nippon dans sa glorieuse période 2D, embelli juste ce qu'il faut d'une touche 32 bit de bon aloi.
GOOD : 7/10 -> 78%
TECHNICAL :
GAMEPLAY :
GRAPHICS :
SOUND :
STORY :